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Résultats d’examen DLCO avec PowerCube Diffusion

Anomalie des résultats d’EFR de patients COVID-19 en sortie d’hospitalisation

Xiaoneng Mo, Wenhua Jian, Zhuquan Su, Mu Chen, Hui Peng, Ping Peng, Chunliang Lei, Shiyue Li, Ruchong Chen, Nanshan Zhong

>> Traduction de l’étude : Mo X, Jian W, Su Z, et al. Abnormal pulmonary function in COVID-19 patients at time of hospital discharge. Eur Respir J 2020; (https://doi.org/10.1183/13993003.01217-2020)

 

Le 11 mars 2020, l’OMS a déclaré que Covid-19 avait atteint le stade de la pandémie. Au 22 avril, plus de 2,4 millions de cas avaient été confirmés dans le monde entier(1).

La découverte de nombreuses lésions pulmonaires chez les patients Covid-19(2,3) soulève la question de leur évaluation chez les patients sortis d’hospitalisation.

Une étude récente a démontré que les patients retournés au domicile avec une pneumonie Covid-19 présentent toujours des artefacts sur leurs scanners thoraciques, le plus souvent une opacité de type « verre pilé »(4).

Parmi les survivants d’autres pneumonies causées par des coronavirus (SARS, MERS), il a été démontré qu’une réduction chronique des performances pulmonaires et des aptitudes à l’exercice physique persiste pendant des mois et même des années(5 à 8). Il n’y a jusqu’à présent eu aucune étude sur ce sujet chez les patients Covid-19.

Notre article présente donc les caractéristiques pulmonaires de tels sujets.

Nous avons recrutés des cas de Covid-19 non critiques parmi les patients hospitalisés dans notre établissement entre le 5 et le 17 mars. Ils ont été classés en catégories, définies par les bonnes pratiques chinoises et celles de l’OMS(9) :

  • maladie sans gravité (symptômes faibles, pas de traces à l’imagerie)
  • pneumonie (symptômes évidents et image confirmant le diagnostic, sans besoin d’oxygénothérapie)
  • pneumonie sévère (pneumonie + un des symptômes suivants : FR > 30 ; détresse respiratoire aiguë : SpO² < 93% au repos et sous air ambiant)
  • cas critiques (détresse respiratoire nécessitant le recours à la ventilation, choc septique, défaillance d’un autre organe, admission en réanimation) – ces cas étaient exclus de notre étude

Spirométrie, pléthysmographie et mesure de la DLCO ont été effectuées la veille de la sortie selon les recommandations ERS-ATS. La DLCO a été mesurée sur un seul cycle respiratoire pour minimiser les risques d’infections croisées. Les patients ont tous donné leur accord par écrit et l’étude a été validée par le comité d’éthique du 8° Hôpital Populaire de Guangzhou (Canton).

110 patients ont été inclus : 24 cas sans gravité, 67 pneumonies et 19 pneumonies sévères (tableau n°1). 55 d’entre eux étaient des femmes et leur âge moyen était de 49.1 ans.

40% de ces patients (44) présentaient une comorbidité sous-jacente, dont 24% une hypertension et 8% un diabète. Seuls trois patients (2,7%) souffraient de problèmes respiratoires chroniques : un asthmatique, un BPCO et un DDB.

Aucune différence significative n’a émergé parmi les trois groupes, ni par genre, statut fumeur / non-fumeur, comorbidité ou IMC. Il s’est écoulé 20+/-6 jours entre le début de l’hospitalisation et l’examen pour les patients sans gravité, 29 +/-8 jours pour les pneumonies et 34 +/-7 jours pour les pneumonies sévères.

 

Le jour de leur sortie, la SpO² au repos sous air ambiant était normale chez tous les sujets ; aucune différence significative n’a émergée entre les groupes (p>0,05 dans tous les cas).

Tous les patients ont subi les examens, sauf deux DLCO ratées. Des anomalies ont été relevées dans les proportions suivantes : DLCO dans 51 cas (47,2%), CPT dans 27 cas (25%), VEMS dans 15 cas (13,6%), CVF dans 10 cas (9,1%), rapport VEMS/CVF dans 5 cas (4,5%) et voies aériennes distales dans 8 as (7,3%).

Le tableau 1 révèle des différences significatives dans la capacité de diffusion (DLCO) parmi les trois groupes, avec 30% des patients concernés pour les cas légers, 42% pour les pneumonies et 84% pour les pneumonies sévères (p<0,05). La réduction est proportionnelle au niveau de gravité de la maladie.

Près de la moitié de ces patients (25 sur 51) présentaient un rapport DLCO/VA (KCO) normal, ce qui pourrait indiquer que la réduction de DLCO était supérieure chez ces sujets.

La CPT était bien plus réduite chez les sujets sévères que chez les autres groupes, suggérant une plus forte altération du volume pulmonaire pour ces cas.

Aucune différence significative parmi les patients n’est apparue dans les autres paramètres mesurés (VEMS, CVF, VEMS/CVF).

Des études récentes montrent que les poumons sont l’organe le plus affecté par Covid-19(2,3) : destruction de l’épithélium alvéolaire, lésions capillaires et saignements, formation d’une membrane hyaline, épaississement de la paroi alvéolo-capillaire et condensation pulmonaire. Des études antérieures ont démontré que les poumons de patients ayant recouvré d’une pneumonie à coronavirus sont endommagés. La réduction des fonctions pulmonaire est fréquente et pouvait durer des mois et même des années.

Dans les études de suivi entre six mois et deux ans de patients SARS en réhabilitation(5 à 7), la réduction de la DLCO était constatée dans 15 à 43% des cas, suivie d’une réduction de la CPT dans 5 à 11% des cas. Wan et al. ont montré que 37% des patients ayant survécu au MERS présentaient toujours une DLCO réduite après un an, mais que leur CPT était redevenue normale(8).

Nos résultats semblent cohérents avec ceux des études sur le SARS. De manière intéressante, le déclin de la DLCO supérieur à celui du KCO (DLCO/VA) suggère que l’altération de la membrane alvéolo-capillaire joue un plus grand rôle que la réduction des volumes pulmonaires.

La faible proportion et la sévérité réduite des dysfonctionnements de voies aériennes distales suggèrent également que Covid-19 affecte probablement l’épithélium bronchique de façon diffuse, avec congestion des voies aériennes distales. Les mesures dynamiques de DLCO se sont avérées plus fines que l’imagerie par scanner dans l’évaluation des changements de la structure pulmonaire(11).

Des études supplémentaires seront nécessaires pour établir si les patients présentant une réduction de leur DLCO ou des anomalies sur leur scanner thoracique développeront des fibroses pulmonaires.

Notre étude présente plusieurs limitations. Tout d’abord, nous n’avons pu comparer les scores des patients avec des résultats de mesures antérieures à la maladie. Puisque seul une minorité présentaient des pathologies pulmonaires chroniques, il semble raisonnable de spéculer leur fonctions pulmonaires étaient en majorité normales. Notre interprétation de l ‘impact de Covid-19 reste donc valide.

 

Ensuite, nous n’avons pas corrélé les résultats d’imagerie à ceux des EFR dans cette étude.

Enfin, il ne s’agit que d’une étude à court terme ; l’évolution à long terme des fonctions pulmonaires de ces patients nécessitera d’autres études.

En conclusion, notre étude révèle que, parmi les patients rentrés à domicile après une hospitalisation pour Covid-19, la réduction de la DLCO, suivie d’une restriction ventilatoire, toutes deux proportionnelles à la sévérité de la maladie, sont les anomalies pulmonaires les plus fréquemment constatées.

Pour ces patients, il faut envisager un suivi régulier par EFR complètes (pas seulement la spirométrie mais aussi la DLCO), en particulier pour les cas sévères.

On peut envisager la réhabilitation pulmonaire comme stratégie optionnelle. Il faudra des études à long terme pour déterminer si ces déficits persisteront avec le temps.

Résultats d’EFR des patients post-COVID-19

 

Références
  1. World Health Organization. Coronavirus disease (COVID-19) Situation Report-93. https://www.who.int/docs/default-source/coronaviruse/situation-reports/20200422-sitrep-93-covid-19.pdf. Accessed April 22, 2020
  2. Zhou F, Yu T, Du R, et al. Clinical course and risk factors for mortality of adult inpatients with COVID-19 in Wuhan, China: a retrospective cohort study. Lancet 2020; 395:1054-62
  3. Xu Z, Shi L, Wang YJ, et al. Pathological findings of COVID-19 associated with acute respiratory distress syndrome. Lancet Respir Med. 2020 ;8:420-422
  4. Wang YH, Dong CJ, Hu Y, et al. Temporal Changes of CT Findings in 90 Patients with COVID-19 Pneumonia: A Longitudinal Study [published online March 19, 2020]. Radiology. doi: 10.1148/radiol.2020200843
  5. Hui DS, Joynt GM, Wong KT, et al. Impact of severe acute respiratory syndrome (SARS) on pulmonary function, functional capacity and quality of life in a cohort of survivors. Thorax. 2005; 60: 401-9.
  6. Hui DS, Wong KT, Ko FW,wt al. The 1-year impact of severe acute respiratory syndrome on pulmonary function, exercise capacity, and quality of life in a cohort of survivors. Chest. 2005 .128:2247-61.
  7. Ngai JC, Ko FW, Ng SS, et al. The long-term impact of severe acute respiratory syndrome on pulmonary function, exercise capacity and health status. Respirology. 2010; 15: 543-50.
  8. Park WB, Jun KI, Kim G, et al. Correlation between Pneumonia Severity and Pulmonary Complications in Middle East Respiratory Syndrome. J Korean Med Sci. 2018; 33: e169
  9. Clinical management of severe acute respiratory infection when COVID-19 is suspected. Released by World Health Organization on 13 March 2020. https://www.who.int/publications-detail/clinical-management-of-severe-acute-respiratoryinfection-when-novel-coronavirus-(ncov)-infection-is- suspected.
  10. Diagnosis and Treatment Protocol for Novel Coronavirus Pneumonia (Trial Version 7)

https://www.who.int/docs/default-source/wpro—documents/countries/china/covid-19-briefing-nhc/1-clinical-protocols-for-the-diagnosis-and-treatment-of-covid-19v7.pdf    Released by National Health Commission & State Administration of Traditional Chinese Medicine on March 3, 2020

  1. Xie L, Liu Y, Xiao Y, et al. Follow-up study on pulmonary function and lung radiographic changes in rehabilitating severe acute respiratory syndrome patients after discharge. Chest. 2005 ;127: 2119-24